CAPTIVE
Lentement,la jeune femme déambule dans le couloir sous la lumière blafarde des néons, attentive aux bruits familiers qui lui parviennent: le ronronnement de l'extracteur crachant de temps à autre comme un vieux chat enroué, le murmure des voix derrière une porte, plus loin un poste de télévision tient en haleine des milliers de personnes, fatiguées de leur semaine de travail avec une émission populaire.
Son pas se fige, incertaine sa main s'apprête à frapper le battant bleu, un sanglot lui parvient si faible qu'il lui faut tendre l'oreille, pour percevoir un autre sanglot tout aussi discret! Pour ne pas effrayer son occupante, elle toque doucement à sa porte, une voix chevrotante l'invite à rentrer.
Près de la grande fenêtre, un visage au parchemin délicatement froissé par le temps se tourne vers la demoiselle en blanc, des larmes brillent cheminant dans de profonds sillons, une mèche de cheveux gris tombe sur ses yeux, pour cacher à l'indiscréte l'origine de son chagrin.
De ses lèvres desséchées s'échappent un soupir d'exaspération, visiblement le programme télé l'agace prodigieusement, et si ses mains inertes et raides avaient pu se saisir de la télécommande, elle aurait fait taire la péroreuse!
La soignante met fin à son supplice audiovisuel en éteignant la petite boîte à images. Le calme règne à nouveau dans la chambre, mais la vieille dame pleure encore, la jeune femme s'approche et délicatement prend sa main, essuie ses larmes, et attire son attention sur le majestueux marronnier qui règne en seigneur séculaire sur la pelouse. Les rayons du soleil automnal jouent dans les feuilles aux couleurs or et rouille.
Un petit écureuil explore la cime de l'arbre avec agilité, sa quête le mène à l'extrémité d'une branche où il se retrouve nez à nez avec une pie, qui apeurée s'envole à tire d'aile. Cette contemplation bucolique apaise la personne âgée qui esquisse un sourire, le temps d'un instant elle oublie sa captivité; ainsi, prisonnière de son corps son esprit vagabonde librement....
KRYSTEL