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ofildmo
4 février 2023

L'enfant qui voulait rejoindre les étoiles



La gare ressemble à un décor de cinéma abandonné, il faut traverser les rails pour rejoindre les quais. De vieux bâtiments aux façades lugubres font face à un minuscule abri équipé d'un unique banc. La gare, une vieille bâtisse aux peintures défraichies est déserte. Pas un bruit en cette fin d'après-midi d'hiver, je frissonne, des larmes coulent sur mes joues, cet endroit me fait trembler d'effroi.

Je ressens toute ta détresse, ta solitude, ce vide immense qui envahi tout ton être, je te parle comme si tu pouvais m'entendre : " comme tu devais souffrir, pauvre petit ange pour venir mourir dans pareil endroit ! " Pourquoi ? comment ? tant de questions qui resteront sans réponse....

Ton décès m'a révolté, on ne peut pas mourir à ton âge, tu avais toute la vie devant toi, ta souffrance était telle, que tu as décidé d'y mettre un terme ! Ce jour là, à mon travail je venais de m'installer pour me restaurer, un message de ta mère attira mon attention, je relisais, plusieurs fois, sans le comprendre ce message laconique : J'ai perdu ma fille.

J'allais recracher la bouchée de nourriture que je n'arrivais plus à avaler et essayaie de demander à ta mère : j'ai peur de ne pas bien comprendre ton message ? Sa réponse me glaça les sangs : elle est décédée. Je répétais bêtement la réponse comme pour en chercher le sens. J'étais affalé au dessus de mon assiette et mon cerveau tournait en boucle l'information, tentant de la rejeter, ta mère avait rajouté c'est un suicide ! Je ne pouvais pas retenir le flot de larmes, la sonnerie de mon portable m'arracha à l'onde de choc, il me signalait la fin de ma pause. Je devais reprendre mes esprits avant de reprendre mon service, je jetais mon repas intact mes mains tremblaient mais pas moyen d'interrompre cette crise de larmes. Je remettais mon masque en place et retournais dans mon unité. 

Mes collègues comprirent qu'il y avait un problème, quand je leurs annoncé ton décès elles blêmirent, elles te connaissaient elles aussi puisque nous t'avions soigner après une énième ponction de ta tumeur. Courageuse battante que tu étais depuis ta naissance, tu avais 10 semaines quand les médecins découvrir ta tumeur au cerveau, ils donnaient pas chère de ta peau et pensaient que tu ne survivrais pas, c'était sans compter sur l'amour de tes parents qui partirent à Paris pour de multiples voyages chez les neurologues les plus réputés pour te soigner, tu as passé ta vie dans les hôpitaux avec ta famille pour faire mentir le corps médical.

La première fois que je t'ai rencontré tu avais une dizaine d'années, j'accompagnais mes enfants à l'école du village, tu étais dans le hall, assise par terre,seule, le visage triste. Je demandais à ma fille qui avait ton age de bien vouloir avoir la gentillesse de s’enquérir du pourquoi de ta tristesse et d'essayer de te consoler, ce qu'elle fit et vous voilà devenues bonnes copines, avec le temps vous vous êtes éloignées mais grâce aux réseaux toujours en contact!

Comment lui annoncer cette terrible nouvelle? Je ne sais pas, mais je me précipite chez elle après mon travail, son ami nous accueille et voit qu'il se passe quelque chose de grave, en attentant ma fille il s'affaire pour ranger ses courses et nous raconte à son père et moi: Une collègue ce matin est arrivée en retard au boulot car une jeune fille du coin est passée sous un train. Je vacillais, je venais de comprendre comment elle avait mis fin à ses jours. D'une voix blanche j'expliquais : C'est pour cette raison que nous sommes venus, la jeune fille c'est Julie la copine de Maelle, sa mère m'a annoncé son décès ce matin.

Ma fille enfin arriva elle tomba dans mes bras en sanglotant : Oh maman c’est horrible, je n’arrête pas d'avoir l'image dans ma tête, pourquoi elle a fait un truc aussi violent? Je ne sais pas ma chérie, peut-être parce qu'elle souffrais trop! Dis- toi que tu as fais partie des personnes qui lui ont fait du bien, que tu n'y es pour rien, que tu n'as rien à te reprocher.

Alors pourquoi cette culpabilité? Parce que la mort d'un enfant est un échec collectif, parents, famille, amis, société avons loupé notre mission de protection du plus fragile.

 

 

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ofildmo
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ofildmo
  • Au fil des mots des textes prennent forme, ils sont le reflet des pages de notre vie : joyeux, tristes, inquiétants, ennuyeux (avec des coquilles orthographiques), peu importe le livre de notre destin s'écrit à l'encre de nos veines.
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